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Publié le 23 Oct, 2022
Catégories : Lettres au Bon Goût

Chaque chien doit avoir un nombre raisonnable de puce pour comprendre qu’il est un chien.

De la même façon, toute entreprise doit avoir un nombre raisonnable de contrôles administratifs pour savoir qu’elle est une entreprise reconnue.

Oui, Monsieur l’Inspecteur

Pour nous, c’est clair, nous sommes bien une entreprise reconnue, nous en sommes à notre quatrième contrôle fiscal en 20 ans.

Un tous les 6 ou 7 ans. Il paraît que la moyenne c’est dix ans, d’après mon contrôleur.

Car nous finissons par devenir intime avec mon vérificateur, il faut dire que notre dernier contrôle a commencé le 3 mars 2022, bientôt 8 mois. 

Il faut dire aussi que notre inspecteur est particulièrement suspicieux et pointilleux. 
Pour lui, tout ce qui n’est pas « normal »  est louche.

Compter les serviettes en papier

Il aurait aimé qu’on soit un restaurant « normal » (par normal, j’entends «qui ne fait que ça »), qui n’a pas un potager, qui ne fait pas tout un tas de choses suspectes : des jambons, des foie gras, de la farine, …

Parce qu’un restaurant avec des serviettes en papier , on compte le nombre de serviettes et le nombre de repas et ça doit correspondre.

La variante si les serviettes sont en tissu, c’est la facture de blanchisserie ou de location de linge.

Il peut aussi comptabiliser le ratio entre le vin et les repas. 

En bref, il a tout un tas d’abaques établies pour vérifier qu’un restaurant « normal » est dans les ratios de la profession (il a les mêmes repères pour à peu près toutes les professions : les boulangers, les coiffeurs, les mécaniciens, …). 

Mais pour la Maison Duler, il n’a pas de référence car l’activité est trop spécifique, diversifiée, et ça le laisse perplexe.

Ce qui n’est pas standard est suspect

Alors, il a tout vérifié, successivement, d’abord le plus gros : les investissements des travaux d’aménagement, sur 28 ans.

Tout y est passé, de l’enrichissement personnel à l’utilisation privée, il a remis en cause tous les travaux d’aménagement.

Il a fallu retrouver toutes les factures de travaux depuis 1994 : maçonnerie, charpente, menuiserie, carreleur, … et justifier chaque taux d’amortissement.

Heureusement, nous avons une comptable en béton armé.

Il a envoyé des demandes d’informations à nos fournisseurs.

Il est même allé chez le menuisier qui fabrique nos caisses à jambon en bois pour compter les caisses facturées et vérifier si ça correspondait au nombre de jambons vendus, en remontant jusqu’à 2018 (Et oui, grâce à la mise en place du prélèvement à la source en 2019, il peut exceptionnellement remonter sur 4 années au lieu de trois).

Et je peux vous dire qu’en 8 mois, il ne nous a rien épargné (ce n’est d’ailleurs pas encore fini). Bon, je ne vais pas vous faire un inventaire à la Prévert de toutes ses demandes.

 Mais il y en a une dont j’aimerais vous parler car elle est au cœur de notre démarche gastronomique.

L’autoconsommation

Mon contrôleur me dit que forcément, nous consommons les produits de l’entreprise puisque nous vivons sur place,  et que c’est un « avantage en nature » que nous devons déclarer. C’est ce que nous faisons bien entendu, mais il n’est pas d’accord sur le montant. 

Peu importe que ces prédécesseurs aient trouvé ce montant normal. Pour lui, c’est sous-estimé car il s’agit de produits gastronomiques.

Alors oui, c’est vrai nous mangeons tous les jours de l’année des produits délicieux et exceptionnels (qui valent cher), mais Monsieur l’Inspecteur c’est aussi parce que nous les goûtons toute l’année qu’ils sont exceptionnels.

Là, il m’a répondu un truc du genre « ce n’est pas non plus très compliqué ce que vous faites, ça ne demande pas beaucoup de recherches  » et sur le coup, je suis resté baba.

Parce que c’est vrai, ce qu’on fait, ce n’est pas très compliqué, ce n’est pas de la haute technologie, et puis c’est toujours pareil.

Il a failli me faire douter mon inspecteur.

Filet de porc gascon mariné aux herbes, Beignets au levain : fleur de fenouil, fleur de courgette, sauge et poireau du potager. (c) Régis Grman

Heureusement, il y a Nicolas Boileau

« Hâtez-vous lentement, et sans perdre courage,
Vingt fois sur le métier remettez votre ouvrage,
Polissez-le sans cesse, et le repolissez,
Ajoutez quelquefois, et souvent effacez ».

–  Nicolas Boileau

Et ces quelques vers m’ont rappelé la base du travail du bon artisan,  se hâter lentement et remettre inlassablement l’ouvrage sur le métier.

Veille technologique – Recherche et Développement

Et c’est là que j’ai eu du mal à faire comprendre, ou plutôt percevoir à mon contrôleur la notion de plaisir et celle de travail, et que les deux peuvent se conjuguer (c’est sûr que cette notion de plaisir dans le travail peut sembler éloignée de son activité professionnelle).

Car il a raison mon inspecteur, techniquement ce n’est pas compliqué cuisinier-paysan, chaque année on refait à peu près la même chose à chaque saison.

C’est comme le vigneron qui chaque année fait le même vin.

Et on y prend beaucoup de plaisir.

différent, en fonction de la météo,  de la récolte, … il faut s’adapter et se remettre en question en permanence.

Et comme c’est différent, on goûte, et on y prend très souvent du plaisir, beaucoup de plaisir.

Et, les bons vignerons vous le diront, il faut goûter, goûter et goûter et c’est comme ça qu’on fait les grands vins… et aussi les bons produits.

 Et c’est comme ça que nous travaillons, n’en déplaise à mon inspecteur fiscal, nous goûtons quotidiennement et nous améliorons nos produits en permanence, rien n’est figé tout est sujet à amélioration.

C’est notre boulot et c’est notre bonheur, et peut-être que ça se sent un peu dans nos produits ?

C’est notre mission, et c’est aussi un jeu

Alors oui, Monsieur l’inspecteur, même si vous devez nous contrôler chaque année nous continuerons, nous goûterons, et nous chercherons inlassablement le petit détail supplémentaire pour aller plus loin car c’est notre mission. de ramener la gastronomie à son origine : le produit brut et ses infinies facettes.

Une mission qui nous apporte beaucoup de satisfaction.

Et quoi de plus emblématique pour illustrer mes propos
que notre jambon

Car si nous ne goûtons pas notre jambon tous les jours, nous le goûtons au moins chaque « jour ouvré », ce qui fait environ 200 fois par an.

Et ainsi, cette année, nous avons enfin sorti nos jambons 80 mois d’affinage. 

Le vocabulaire manque pour décrire ce jambon tant les perceptions gustatives peuvent être infiniment plus variées que les 100 000 mots de la langue française.

Je dirai pour simplifier à l’extrême : persistance et complexité exacerbées.

C’est un jambon destiné aux amateurs de jambon aux goûts puissants (sous-bois, noix, cuir), il n’est pas à la portée de tous les palais (ni de toutes les bourses !).

Si vous préférez un jambon plus doux pour le palais et pour le portefeuille, optez par exemple pour notre jambon primeur qui existe aussi en version désossée, entier, demi ou quart.


Pour Noël, anticipez vos commandes de foie gras

Fidèles à nos convictions, nous vous proposons uniquement des foies gras issus de producteurs lotois ou limitrophes (Dordogne, …)

Cette année, avec la grippe aviaire, il y a très peu  foie gras  dans le Sud-ouest et nous ne pourrons pas satisfaire tout le monde.

Prévoyez vos commandes assez tôt.

Vous voulez mieux comprendre la gastronomie, l’agriculture et leur impact sur votre santé ?

Rejoignez les lecteurs exigeants de notre « Lettre au Bon Goût »

Patrick Duler

cuisinier-paysan

Fondateur de la Maison Duler

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